Paroles de Poètes, Perles de Vie

Paroles de Poètes, Perles de Vie

Elan Mystique

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Alors j'avais quinze ans. Au sein des nuits sans voiles,
Je m'arrêtais pour voir voyager les étoiles
Et contemplais trembler, à l'horizon lointain,
Des flots où leur clarté jouait jusqu'au matin.
Un immense besoin de divine harmonie
M'entraînait malgré moi vers la sphère infinie,
Tant il est vrai qu'ici cet autre astre immortel,
L'âme, gravite aussi vers un centre éternel.

Mais, tandis que la nuit marchait au fond des cieux,
Des pensers me venaient, graves, silencieux,
D'avenir large et beau, de grande destinée,
D'amour à naître encor, de mission donnée,
Vague image, pour moi, pareille aux flots lointains
De la brume où nageaient mes regards incertains.
— Aujourd'hui tout est su ; la destinée austère
N'a plus devant mes yeux d'ombre ni de mystère,
Et la vie, avant même un lustre révolu,
Garde à peine un feuillet qui n'ait pas été lu.
Humble et fragile enfant, cachant en moi ma flamme,
J'ai tout interrogé dans les choses de l'âme.
L'amour, d'abord. Jamais, le cœur endolori,
Je n'ai dit ce beau nom sans en avoir souri.

Puis j'ai soudé la gloire, autre rêve enchanté,
Dans l'être d'un moment instinct d'éternité !
Mais pour moi sur la terre, où l'âme s'est ternie,
Tout s'imprégnait d'un goût d'amertume infinie.
Alors, vers le Seigneur me retournant d'effroi,
Comme un enfant en pleurs, j'osai crier : « Prends-moi !
Prends-moi, car j'ai besoin, par delà toute chose,
D'un grand et saint espoir où mon cœur se repose,
D'une idée où mon âme, à qui l'avenir ment,
S'enferme et trouve enfin un terme à son tourment. »

Louise Ackermann

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Recueil ; Premières Poésies

 

Nationalité : France
Né(e) à : Paris , le 30/11/1813
Mort(e) à : Environs de Nice , le 03/08/1890

 

Louise-Victorine Ackermann, née Louise-Victorine Choquet était une poétesse française.

Elevée par un père féru des idées des encyclopédistes, qui s'opposait à ses élans mystique, elle connut une enfance triste et solitaire dans l'Oise, à la campagne.

Ses premières poésies (L'Homme, 1830), datent de ses années e pensionnat à Paris et illustrent déjà un penchant au pessimisme qui ne la quitta jamais.

De 1832 à 1841, ses poèmes paraissent régulièrement dans "Les Oeuvres" ( Elan mystique, 1832; Aux femmes, 1835; Renoncement 1841 ), envahis par un désespoir croissant.

 

Parmi tous les pessimistes post-romantiques, Mme Ackermann offre assurément le type le plus achevé de ce qu’on est convenu d’appeler, depuis Vigny, le poète-philosophe. Contemporaine de Guyau et de Sully Prudhomme, autres poètes philosophes, mûrie par une méditation prolongée, elle professa un pessimisme tout rationnel, c’est-à-dire philosophique.


Après la mort de ses parents, elle s'installa à Berlin et épousa en 1844 Paul Ackermann, grammairien et pasteur protestant.
Jusqu'à la mort de celui-ci, deux ans plus tard, elle abandonna la poésie, s'adonna à la philosophie allemande, fréquenta Humbolt, Baeck, Muller.

Devenue veuve, elle se retira à Nice et poursuivit son oeuvre, renouant avec une inspiration poétique plus sereine, qu'elle cherchait à concilier avec ses aspirations philosophiques:"Contes" (1850-1853); "Premières poésies" (1863); "Poésies philosophiques" (1871); "Ma vie" (1874); "Les Pensées d'une solitaire" (1882).

Son autobiographie révèle une pensée lucide, un amour de l’étude et de la solitude, ainsi que le souci de l’humanité qui transparaîtra dans ses textes.

 



31/03/2022
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