Léon Dierx
L'invisible Lien
L'invisible lien, partout dans la nature,
Va des sens à l'esprit et des âmes aux corps ;
Le chœur universel veut de la créature
Le soupir des vaincus ou l'insulte des forts.
L'invisible lien va des êtres aux choses,
Unissant à jamais ces ennemis mortels,
Qui, dans l'anxiété de leurs métamorphoses,
S'observent de regards craintifs ou solennels.
L'invisible lien, dans les ténèbres denses,
Dans le scintillement lumineux des couleurs,
Eveille les rapports et les correspondances
De l'espoir au regret, et du sourire aux pleurs.
L'invisible lien, des racines aux sèves,
Des sèves aux parfums, et des parfums aux sons,
Monte, et fait sourdre en nous les sources de nos rêves
Parfois pleins de sanglots et parfois de chansons.
L'invisible lien, de la terre aux étoiles,
Porte le bruit des bois, des champs et de la mer,
Léger comme les cœurs purs de honte et sans voiles,
Profond comme les cœurs pleins des feux de l'enfer.
L'invisible lien, de la mort à la vie,
Fait refluer sans cesse, avec le long passé,
La séculaire angoisse en notre âme assouvie
Et l'amour du néant malgré tout repoussé.
Léon Dierx
1838 – 1912
Marais Victor Léon Dierx, né à Saint-Denis de La Réunion le 31 mars 1838 et mort à Paris le 11 juin 1912, est un poète parnassien et un peintre, sculpteur français.
Léon Dierx, un Prince des poètes à La Réunion
Léon Dierx est né à Saint-Denis, rue de Paris, dans une grande maison aujourd’hui connue sous le nom de Maison Déramond. Il passe aussi une partie de son enfance sur une propriété à Montgaillard, sur les hauteurs du chef-lieu, site enchanteur qui le marque profondément.
Dierx quitte La Réunion pour Paris à l’âge de 15 ans afin de poursuivre ses études qu’il abandonne vers 1855 pour se consacrer entièrement à la poésie. La ruine de sa famille le contraint à reprendre ses cours, puis à travailler ; il occupe plusieurs postes dans les administrations parisiennes.
En 1860 puis en 1892, le poète revient à La Réunion pour de courts séjours. Poète applaudi, il participe au « Parnasse contemporain », dont le chef de file est le Réunionnais Charles Leconte de Lisle. Entre 1858 et 1879, Dierx publie plusieurs recueils et cesse d’écrire après cette date jusqu’à la fin de sa vie. Cependant, sa présence est appréciée dans les salons littéraires. Des journalistes, des écrivains ou des poètes se réfèrent à son œuvre. Il fait l’objet de nombreux articles dans la presse et reçoit de nombreux prix.
En 1885, reconnu par ses pairs, il a le privilège de faire partie du groupe des poètes chargé de la veillée funèbre de Victor Hugo sous l’Arc de Triomphe. En 1898, il est sacré « Prince des Poètes » par ses pairs, succédant à Stéphane Mallarmé.
Le poète s’éteint en juin 1912 mais laisse un patrimoine artistique que l’on peut retrouver au musée qui porte son nom depuis le 12 novembre 1912 à la Réunion.
Source : https://artetculturefontainebleau.fr/